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dimanche 12 juillet 2015

Les temps changent (paysannerie).

Extrait d'un article "Français, vous avez changé" paru dans l’édition du Monde du samedi 30 mai 2015.

Dans "La France en chiffres", un ouvrage qu'il a dirigé, l’historien olivier Wieviorka offre une radiographie de notre pays depuis 1870. C'est un livre passionnant que l'on peut feuilleter pendant des heures pour le simple plaisir de découvrir des informations surprenantes, des statistiques oubliées ou des perspectives nouvelles...

Regard sur une des six révolutions du siècle dernier : La lente agonie de la paysannerie

La disparition de la paysannerie est sans doute l'une des grandes révolutions du XXe siècle. A la fin du Second Empire, en 1870, la France est encore une nation rurale : les 2/3 des Français vivent à la campagne. Alors que les autres pays industrialisés d'Europe, et notamment l'Angleterre, connaissent, à la fin du XXe siècle, un exode rural à marche forcée qui nourrit la croissance du monde industriel et des cités ouvrières, la France rurale sombre avec une très grande lenteur: dans le années 1930, la moitié des Français résident encore à la campagne.


Aujourd'hui, la ruralité est très affaiblie. "La France s'est largement urbanisée au XXe siècle, constate l'ouvrage. A plus de deux tiers rurale en 1872, elle est désormais pour plus des trois quarts urbaine. La taille des agglomérations s'est accrue: si plus de 75% de la population habite dans des petites communes de moins de 5000 habitants en 1861, ils ne sont plus que 29% en 2006". Les agriculteurs ont fait les frais de ces bouleversements: ils représentaient 50% des actifs en 1870, ils sont moins de 4% aujourd'hui. La modernisation engagée aux lendemains de la seconde guerre mondiale a, en outre, profondément transformé les modes de vie , qui n'ont plus grand chose a voir avec ceux des "paysans" d'antan.

Cette disparition de la paysannerie avait été annoncée, en 1967, par un livre -controversé- du sociologue Henri Mendras, La Fin des paysans (Sedeis, réédition Actes Sud). "En une génération, la France a vu disparaître une civilisation millénaire, constitutive d'elle-même, écrivait-il dans une post face rédigée en 1984. Pourtant, aujourd'hui encore, beaucoup se refuse à l'évidence, notamment parmi ceux qui ont été les artisans de cette disparition, hauts fonctionnaires, hommes politiques et dirigeants agricoles. Comme s'il était inconvenant de dire à la famille qu'elle est au chevet d'un cadavre "Chut, il dort."

"La France en chiffres de 1870 à nos jours" sous la direction d'Olivier Wieviorka (Perrin, 666 p, 28 €).


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